L'Irlande connaît le plein-emploi depuis plusieurs années », explique Roger Fox, l'un des directeurs de la FAS, l'agence nationale pour l'emploi et la formation. Le taux de chômage ne dépassait pas 4,3 % le mois dernier. « Nombre de secteurs manquent de personnel et le recours à la main-d'oeuvre extérieure est indispensable ». A tel point que la FAS doit multiplier les opérations de recrutement à l'étranger.
Près de 10 % de la population active en Irlande est aujourd'hui d'origine étrangère. Une révolution pour un pays qui, jusqu'en 1995, était encore une terre d'émigration. « Un fois les études finies, il était fréquent autrefois d'aller chercher du travail ailleurs », se souvient Liam Ryan, qui, après une carrière en Allemagne, dirige désormais le géant du logiciel SAP dans l'île. Sans assurance de revenir. Ce n'est plus le cas. Pour la première fois depuis... 1871, l'Irlande vient de voir sa population franchir la barre des 4 millions d'habitants. Blanche et catholique, la verte Erin est devenue multiethnique et cosmopolite.

Deux décennies de spectaculaire croissance sont passées par là. Pays le plus pauvre de l'Union européenne il y a vingt ans, avec un taux de chômage de 17 %, l'île en est maintenant l'Etat le plus riche par habitant, après le Luxembourg.

Fiscalité « light » pour les entreprises (le taux de l'impôt sur les sociétés a été ramené à 12,5 % en 2003), réduction des dépenses publiques, flexibilité du marché du travail, privatisations, déréglementations : le tournant libéral pris en 1987, allié à une quête assidue d'investissements étrangers, ont produit des résultats inespérés.

Après avoir bondi de plus de 10 % à la fin des années 1990, à la grande époque de la bulle Internet, le PIB a encore progressé de 6 % l'an dernier. Et le « Tigre celtique » ne semble pas vouloir s'assagir.

Tous les géants américains des technologies de l'information ou presque (IBM, Dell, Intel, Microsoft, Google, eBay...), neuf des dix plus importants laboratoires pharmaceutiques mondiaux, des services financiers en plein essor (le cap des 1000 milliards d'euros de fonds gérés a été dépassé) : à l'évidence, l'Irlande a su tirer parti de la mondialisation.
Et faire vibrer la corde sentimentale de nombre de ses enfants partis faire fortune dans le nouveau monde. Ceux qui ne sont pas revenus au pays ont fait du lobbying pour leur terre ancestrale.
Avec succès : l'île d'émeraude accueille plus du tiers de l'investissement américain en Europe !

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